Anne Sylvestre : « j’suis heureuse que «feministe» ne soit plus une insulte »

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Notre chanteuse des Fabulettes, et de documents tres engages Afin de la cause des jeunes femmes, vient de nous quitter. Nous l’avions rencontree en 2019 Afin de une grande interview dans Femme Actuelle Senior. Nous en reproduisons des extraits.

Restez informee

Vous etes tres minimum mediatisee mais consideree comme une figure importante de la chanson francaise. Comment definiriez-vous la place au paysage musical ?

Je n’en ai aucune initiative. Ca fera soixante ans que je chante, j’suis productrice et editrice de mes ?uvres et je ne me considere gui?re comme marginale. Je n’ai jamais refuse d’etre mediatisee mais, je ne sais gui?re pourquoi, on me tient a l’ecart. Je ne passe pratiquement pas a la radio ni a la tele alors que je remplis chacune des salles ou J’me produis. C’est une injustice, mais ca fera longtemps que j’ai cesse de me casser la tete la-dessus, votre n’est pas la peine. Ce phenomene, je ne me l’explique nullement.

Gainsbourg a dit : « J’ai retourne ma veste Au moment ou je me suis apercu qu’elle etait doublee de vison ». Regrettez-vous de ne point avoir fera des concessions, des choses plus commerciales ?

Non. Je n’ai jamais eu envie d’ecrire ainsi que chanter nouvelle chose que ce que j’ecris et chante. Je n’ai jamais essaye d’etre a la mode, donc je ne me suis jamais demodee. Je fais les trucs a ma facon et il se trouve que cela plait a un certain nombre de personnes. Mais cela est penible dans une telle sous-exposition, votre paraissent les mecs qui me demandent : « Pourquoi vous ne chantez plus ? » ou « Ah… vous etiez chanteuse ? ». C’est le genre de chose qui vous plante un poignard au c?ur. La chanson, c’est mes ri?ves. Evidemment que c’est une deception de ne pas avoir eu la carriere que j’esperais. Mais lequel pourra se vanter d’avoir eu exactement la vie dont il revait ?

Pourquoi avez-vous decide de consacrer une partie de votre boulot a Notre chanson pour bambins ?

Je ne l’ai gui?re decide, votre paraissent les chansons qui sont venues. Elles seront arrivees en aussi temps que nos autres. J’ai ecrit les premieres en 1961 ou 62 et j’ai continue parallelement a alimenter les deux repertoires. J’ai foutu en Fabulettes identiques valeurs que au sein des autres creations. Ce en quoi je crois. Et aussi, tout betement, des choses qui me permettaient de jouer au milieu des mots. Mes mots, c’est beau, on doit beaucoup des servir. J’ai l’impression qu’en ce moment, on doit les sauver. Le vocabulaire se retrecit. Parfois J’me demande s’il ne faudrait gui?re ajouter votre lexique aux chansons que j’ecris.

Comment se fait-il que les musiciens ne prennent pas leur retraite ?

C’est une vie. Tout peut dependre de ce qu’on fera. Si c’etait penible, on s’arreterait. Mais notre metier n’a rien a voir avec une activite traditionnelle. Je ne sais faire que ca.

On vous depeint comme une artiste engagee. Vous reconnaissez-vous dans votre definition ?

Je n’aime nullement les etiquettes. Mais je suis engagee, evidemment. Je suis nee feministe. Malheureusement, desfois on ne comprend jamais le sens de mon engagement. Pour Quelques, c’est lever le poing et participer a toutes les manifs. On va pouvoir s’engager sans militer et je le prouve dans ce que j’ecris. J’ai cette chanson qui s’appelle « Juste une femme », composee au moment de l’affaire DSK. J’imagine que mon feminisme l’fait visible. Ce n’est pas anodin de chanter des trucs comme ca.

Quel regard portez-vous concernant le renouveau actuel du feminisme, tres different de celui des annees 1970 ?

Je suis tres heureuse que « feministe » ne soit plus une insulte. Notre dignite des femmes fait le chemin petit a petit. Qu’on parle des scandales, des choses honteuses, il le va falloir evidemment. Mais il ne faut nullement qu’on en profite Afin de declencher a nouveau la guerre des sexes. Ca devoile, dans une revolution ou un mouvement, vous devez forcement qu’une certaine partie y aille trop extri?mement pour la cause. Quand on vous roule dans le pied et que vous dites « Excusez-moi, vous me marchez sur le pied », il ne se passera rien. Si vous criez « Aie ! » tres extri?mement, il va se passer quelque chose. On doit y aller fort Afin de remplacer des mentalites. Tant qu’on fera des « bonnes blagues » i  propos des dames ou qu’on vendra, dans les lieux touristiques, des assiettes souvenir concernant lesquelles c’est ecrit « Bats ta femme la totalite des journees, si tu ne sais jamais pourquoi, elle le sait », tant qu’on aura des cendriers en forme de fesses, ou des pots a lait en forme de poitrine, et que ca fera beaucoup rigoler, on ne est gui?re sorties de l’auberge. C’est une question de respect.

Au debut de votre carriere, on vous a reclame de vous faire refaire le nez. La dictature du physique etait-elle aussi pregnante qu’aujourd’hui ?

J’imagine que ca va mieux maintenant. On peut chanter en etant grosse ou moche. Evidemment, etre belle est un truc qui plus est. Mais Di?s Que j’suis arrivee dans le milieu, j’avais 23 ans et des femmes connues et influentes a la television m’ont conseille de me faire operer le nez parce que, a l’epoque, il fallait en avoir un petit. J’ai fera une fois un lever de rideau avant Gilbert Becaud, a l’Olympia. Bruno Coquatrix m’a devoile : « Anne, entrez avec le fond. Comme ca, on ne vous verra pas de profil ».

Etes-vous chatouilleuse sur les questions relatives a l’age ?

Ca me casse des pieds qu’on m’en parle sans arret. Mes interviews qui commencent avec « Anne, vous avez 84 annees… », ca va bien. Merci de me le rappeler. Ce que j’aimerais, c’est qu’on aille dans l’autre sens. Qu’on me demande ce que je vais faire maintenant. J’ai plus jolie question qu’on puisse me poser c’est : « Quels paraissent toutes vos projets ? »